Gestion des volontaires
Krista Vandenborre a été formée dans différents instituts supérieurs et universités, et travaille actuellement comme consultante indépendante en gestion hospitalière pour les hôpitaux en Belgique. Au sein de Médecins Sans Vacances, elle a rempli divers rôles au cours des dix-sept dernières années. Tout d’abord en tant que volontaire de terrain dans une organisation hospitalière, pour laquelle elle a effectué plus de dix missions, principalement à l’est du Congo. Elle est aussi membre de l’Assemblée Générale depuis douze ans et préside le Conseil d’Administration depuis deux ans. C’est un rôle dans lequel elle s’est imposée grâce à son professionnalisme. « Nous sommes une organisation bénévole, mais il faut aussi la gérer, n’est-ce pas ? Désormais, nous évaluons les membres du Conseil d’ Administration, ce qui n’était pas le cas auparavant. Nous avons établi les profils nécessaires pour une bonne gestion et nous recherchons également les personnes appropriées à l’extérieur. En outre, notre plus grand défi est de réaliser un partenariat égal avec nos collègues africains. Ces dernières années, nous avons mis encore plus l’accent sur le soutien aux prestataires de soins de santé africains afin qu’ils puissent eux-mêmes mieux s’occuper de leurs patients. »
Le virus africain
Krista a attrapé le virus africain, fin des années 80, lorsqu’elle a travaillé deux étés comme infirmière à l’hôpital de Kimpese, en RD Congo. Quelques années plus tard, elle découvrit Médecins Sans Vacances grâce à un article de journal. “Je leur ai écrit une lettre et ils m’ont invitée pour un entretien. Je leur ai expliqué qu’entretemps mon travail se situait plus sur le plan organisationnel et que je ne me sentais plus assez qualifiée pour travailler en tant qu’infirmière. Mais apparemment, c’est exactement ce qu’ils recherchaient à l’époque. » Un an plus tard, elle fit sa première mission au Congo dans le même hôpital où elle avait travaillé comme étudiante.
Dossier médical
Lors de sa mission suivante à Walungu, elle a introduit le concept du dossier médical du patient et, par extension, les archives médicales : une réalisation dont elle est fière encore aujourd’hui. “ Nous avons constaté qu’il n’y avait pas encore de système pour suivre l’historique médical des patients. Nous avons discuté du contenu d’un tel dossier et de la façon de nous y prendre, en tenant compte des moyens limités. Un dossier électronique étant hors de question, nous avons opté pour une version papier. Rassembler tous ces cartons pliés était déjà un tour de forçe. Nous avons acheté le stock entier de la plus grande papeterie de Bukavu. Depuis lors, la mise en place de telles archives médicales est devenue une partie intégrante du soutien apporté à chaque hôpital partenaire de Médecins Sans Vacances.
“Molière, un comptable consciencieux et méticuleux qui a contribué à la constitution des archives de Walungu, est devenu la personne de référence par excellence, en matière de dossiers médicaux. Il a déjà conseillé bon nombre d’hôpitaux jusqu’ à Kinshasa et au Burundi. Un bel exemple de la manière dont nous nous retirons progressivement.” Car cela reste le but ultime de Médecins Sans Vacances, malgré les circonstances de travail pénibles pour les soignants africains.
Des médecins polyvalents et sursollicités
Interrogée sur les plus grandes difficultés dans l’organisation hospitalière en général, Krista Vandenborre cite surtout la continuité du travail. “Il arrive souvent qu’un hôpital ne compte que trois ou quatre médecins. Comment peut-on donc établir un planning pour assurer les soins aux patients 24h/24 et 7 jours/7? Les médecins sont sursollicités. Je suis toujours impressionnée de voir comment ils y arrivent. En plus, beaucoup de ces médecins sont polyvalents et doivent faire face à toutes sortes de situations. Cela va de l’accouchement urgent au coma diabétique, à des blessés d’accidents de la route. De plus, pour bien guérir et récupérer, les patients doivent pouvoir se reposer et bien manger : actuellement, cette préoccupation du bien-être du patient est laissée principalement à la famille. Lors de mes cours de formation pour directeurs d’hôpitaux, ces aspects sont toujours soulignés.”
Corriger les erreurs de jugement
Bien qu’en Belgique elle occupe souvent des postes de direction, en Afrique elle préfère aller sur le terrain. “On travaille dans des circonstances autrement moins accessibles et très près de la population locale. Cela reste un défi de penser différemment, de réfléchir à ses propres erreurs de jugement. Ainsi, par exemple, le système des trois équipes que nous utilisons n’est pas applicable en RD Congo. Le service de nuit y dure de 16 heures à 7 heures du matin, ce qui m’a semblé terriblement long au départ. Mais l’employé qui arrête le travail à 16 heures doit encore marcher une heure à une heure et demie pour être chez lui avant la nuit. C’est un mode de fonctionnement totalement différent, adapté à leur réalité. Tenir compte de ces éléments, ajuster ses propres idées et essayer toujours de traduire les concepts qui fonctionnent ici dans le contexte local, c’est ainsi que travaille Médecins Sans Vacances. Je suis heureuse de pouvoir y contribuer.”
Texte: Ann Palmers