Jean-Claude Kabidi : pour être infirmier, il faut savoir écouter

Au cours de ses 7 missions pour Médecins Sans Vacances en RDC et au Burundi, Jean-Claude Kabidi – infirmier du bloc opératoire et spécialiste en hygiène hospitalière – dit avoir eu l’opportunité de transmettre et de partager ses connaissances avec les équipes médicales et infirmières locales des hôpitaux partenaires dans lesquels il s’est rendu. Mais il dit aussi avoir eu la chance d’apprendre énormément de ses collègues. Leur expérience, leur connaissance du terrain et leur approche unique des soins de santé lui ont permis d’acquérir de nouvelles perspectives et compétences précieuses !

Comment feraient les patient·es sans les infirmier·ères ? C’est incontestable, ces soignants sont un maillon essentiel dans les soins.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Selon l’Organisation mondiale de la santé, 50 % des professionnels de la santé dans le monde sont des infirmières. Et saviez-vous qu’un·e infirmier·ère est présent·e dans 80 % des missions de Médecins Sans Vacances (MSV) ? D’ailleurs, 40% de nos expert·es-volontaires font ce métier. Qu’il s’agisse d’un départ de Belgique ou d’un pays voisin d’Afrique ; qu’il s’agisse d’une équipe composée uniquement de collègues africains ou d’une équipe mixte se réunissant sur place… sans infirmier·ères, nous ne pourrions pas accomplir complètement nos missions !

Parce que le 12 mai est LA journée internationale qui les met à l’honneur, Médecins Sans Vacances s’est entretenu avec ceux et celles qui sont au chevet des patient·es.

MSV : Pourquoi le rôle d’un infirmier est-il essentiel pour mener à bien une mission MSV?
Jean-Claude :Lors d’une mission, le rôle e l’infirmier est complémentaire à celui des médecins. L’infirmier permet d’assurer une prise en charge globale et de qualité des bénéficiaires des soins. Ainsi il contribue aussi à l’efficacité et à la réussite de la mission dans son ensemble en participant à la formation de l’équipe locale. Il transmet les bons gestes, les bonnes procédures dans le but d’améliorer la qualité des soins. C’est comme cela que les équipes locales se développe.

MSV: Quelles sont les qualités nécessaires pour être infirmier ?
Jean-Claude : Il est important d’avoir des bonnes capacités d’écoutes, de faire preuve d’empathie envers les personnes en difficultés et de démontrer de la résilience pour faire face aux situations parfois douloureuses. Il est également nécessaire d’avoir des bonnes compétences en communications, d’être patient, compréhensif et d’avoir un grand sens de l’humain !

MSV: Pourquoi est-il important pour vous de participer aux missions avec MSV ?
Jean-Claude: Il est important pour moi de participer aux missions car je crois profondément en la valeur de l’aide humanitaire qu’apporte le MSV et en l’importance d’apporter un soutien aux populations les plus vulnérables. C’est parce que l’organisation agit concrètement sur le terrain en apportant des soins de qualités aux personnes dans les besoins, en formant des professionnels locaux et en contribuant au renforcement de systèmes de santé avec du matériel et des équipements que cela a du sens.
En m’engagent aux cotés de MSV j’apporte mes compétences, mes expériences et formations reçues par plusieurs formateurs de MSV aux services des autres. Cela m’enrichit aussi humainement de contribuer et d’avoir un impact positif sur la vie de ceux qui en ont le plus besoin.

MSV: Quels sont les types de gestes ou de compétences que vous transmettez lors d’une mission ?
Jean-Claude: Au cours de mes missions avec MSV en tant qu’infirmier du bloc opératoire et spécialiser en hygiène hospitalière, j’ai eu l’opportunité de transmettre et de partager mes connaissances avec les équipes médicales et infirmières locales.
Par exemple, j’ai donné des formations sur les bonnes pratiques en matière d’asepsie (méthode préventive pour empêcher l’introduction de microbes dans l’organisme), la stérilisation et l’hygiène hospitalière. Comment organiser le bloc opératoire. Ou encore la place de l’hygiène hospitalière dans la démarche qualité 5 S-KAIZEN (Séparer, Systématiser, Salubrité, Standardiser, Se discipliner – une approche qui permet une gestion optimale des formations sanitaires).
J’ai pu aussi partager mes connaissances en matière de préventions des infections nosocomiales et de techniques de stérilisations, le pliage de compresse et des blouses chirurgicales Ceci dans le but de réduire les risques infectieux.

MSV: Vous échangez vos expériences lors des missions, qu’est-ce que vos collègues vous ont transmis lors de missions ?
Jean-Claude : J’ai eu la chance d’apprendre énormément de mes collègues locaux. Leur expérience, leur connaissance du terrain et leur approche unique des soins de santé m’ont permis d’acquérir de nouvelles perspectives et compétences précieuses !
Je retiens tout particulièrement leurs capacités à travailler dans des conditions parfois très limitées et difficiles en termes de ressources matérielles et humaines. Leur adaptabilité et leurs créativités dans la résolution de problèmes, en trouvant des solutions innovantes pour répondre aux besoins des patients malgré les contraintes rencontrées. Leur sens aigu de la collaboration et l’entraide, en travaillant de manière étroite et harmonieuse en équipe pour assurer des soins et une prise en charge des bénéficiaires des soins. Leur empathie et leur compassion envers les bénéficiaires des soins.
Ils m’ont inspiré par leur professionnalisme, leur engagement, leur humanité et m’ont permis de grandir en tant qu’expert du bloc opératoire et hygiéniste formé. Leur enseignement et leur exemple resteront une source d’inspiration pour moi dans ma pratique professionnelle.

MSV: Quel résultat ou impact pensez-vous avoir eu lors de vos missions MSV ?
Jean-Claude: Quand MSV a rénové la buanderie de l’hôpital de Gombe Matadi en RDC, j’ai contribué à améliorer les conditions d’hygiènes et de propreté du linge. Ce qui a eu un impact positif sur la santé et la sécurité des patients et du personnel.
Pour la réorganisation des boîtes d’orthopédie de l’hôpital de Mosango et les boîtes des chirurgies générales de Popo Kabaka et Gombe Matadi, j’ai contribué à optimiser les soins et à garantir une meilleure prise en charge des patients nécessitant des interventions chirurgicales avec sécurité.
En fin, en sensibilisant et en renforçant le respect des normes par les équipes de bloc opératoire, j’ai contribué à améliorer la sécurité des interventions chirurgicales et les qualités des soins.
En encourageant une approche collaborative et professionnelle, les changements apportés ont non seulement amélioré les conditions de travail et les compétences du personnel. Cela a aussi eu un impact direct sur la qualité des soins, la sécurité des patients et la confiance accordée aux hôpitaux par les communautés.

MSV : Parfois il n’y a pas toujours le matériel ou le staff pour gérer une situation… Que faites-vous?
Jean-Claude: Voici une anecdote sur la débrouillardise…
Lors d’une mission, nous avons été confrontés à une situation d’urgence où une femme nécessitait une césarienne d’urgence ?
Le bloc opératoire, était occupé. La césarienne était vitale, car le fœtus souffrait d’une détresse aiguë. Nous avons dû agir rapidement en utilisant la table d’examen d’une autre salle, mais qui n’avait pas de matelas. Nous l’avons déplacée au bloc après désinfection, et nous avons trouvé un matelas de fortune pour améliorer le confort de la femme.
Malgré les difficultés, l’équipe à réaliser l’intervention avec succès, et l’enfant a pu être sauvé et réanimé atteignant un score d’APGAR de 10 (score de vitalité).
Cette situation a mis en lumière notre capacité à faire preuve de débrouillardise et d’esprit d’équipe pour trouver des solutions alternatives dans des conditions précaires.

MSV : Pouvez-vous raconter une histoire de patient qui vous a marqué lors d’une mission MSV ?   Ou une mission qui vous tient à cœur ou qui vous a impressionnée ?
Jean-Claude: Lors d’une mission MSV à l’hôpital de Gombe Matadi, une histoire qui m’a fortement marquée.
Nous avons trouvé une femme enceinte de 34 semaines. Elle avait des difficultés à respirer et son état était critique. Le plateau technique ne permettait pas de répondre à ses besoins. Du coup, nous avons alors contacté le bureau local de MSV pour demander de l’aide et des ressources supplémentaires. MSV a répondu en nous envoyant le matériel et les médicaments nécessaires. Grâce à cela, 10 jours plus tard nous avons pu faire une césarienne… Un enfant de 2.5 kg est né en parfaite santé. La famille était comblée de bonheur ! La maman nous a chaleureusement remercié avec un grand sourire et des étincelles de gratitudes dans les yeux !
Cette expérience a profondément marqué ma vision du métier et renforcer ma conviction que chaque vie compte et mérite d’être sauvée, peu importe les obstacles rencontrés.

MSV : Le 12 mai c’est la Journée mondiale des infirmier·ères, que leur souhaitez-vous?
Jean-Claude : C’est vraiment une journée remplie de reconnaissance et d’appréciations pour tout le travail acharné et dévoué que les infirmier·ères fournissent chaque jour et aussi l’admiration pour leur compassion leur compétence et leur empathie envers les patients. Et en fin, nous les encourageons à prendre soins d’eux-mêmes et à se rappeler de l’importance de leur propre bien-être tout en continuant à offrir des soins de hautes qualités aux patients.

 

Date de publication : 19.04.24

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