La prise en charge de la maladies des plaies ulcéreuses au Burundi

La prise en charge de la maladies des plaies ulcéreuses au Burundi est un projet d’envergure pour Médecins Sans Vacances. C’est avec l’appui de l’OMS que nous contribuons à aider la population à faire face à cette maladie. Pour cela, nous avons adopté une approche spécifique : investigation, formation, appui matériel et sensibilisation.

Depuis décembre 2019, une maladie des plaies ulcéreuses sévit dans certains districts sanitaires des régions du centre et nord du Burundi (Muramvya, Muyinga, Kirundo) avec une tendance d’extension dans d’autres provinces, comme Mwaro et Makamba (quelques cas).
L’installation de cette maladie d’origine encore inconnue est progressive. Elle débute par une lésion cutanée type vésicule ou papule de localisation unique ou multiple au niveau des membres inférieurs dont la rupture spontanée ou par grattage aboutit à une plaie expansive en profondeur et en circonférence. Ces plaies évoluent vers des plaies phagédéniques conduisant à une invalidité.

La maladie touche en majorité les enfants entre 5 et 14 ans. L’installation de la pathologie ne compromet pas seulement leur bien-être, mais elle a aussi un impact sur leur scolarité et leur épanouissement. On note également une réduction de la productivité économique des ménages. L’absence du diagnostic étiologique et la faible connaissance des prestataires vis-à-vis à l’attitude thérapeutique, font que, la population fait recours à l’automédication avec risque de développement de résistance aux antibiotiques et conduit aux dépenses catastrophiques des ménages. Ainsi, à défaut du diagnostic étiologique, le traitement était fonction de l’état de la plaie et du degré d’atteinte, allant d’un simple lavage, à la désinfection locale jusqu’au parage et greffe cutanée ; sans oublier l’utilisation des antibiotiques selon l’état de la plaie.
Pour aider la population à faire face à cette maladie, Médecins Sans Vacances (MSV) a réalisé un projet pilote financé par l’OMS Burundi.

Un projet d’envergure : investigation, formation, appui matériel

Les districts sanitaires de Kiganda, (province sanitaire de Muramvya) et de Fota (la province sanitaire de Mwaro) ont été considérés comme zone pilote. L’action a permis l’intégration de la prise en charge des plaies ulcéreuses dans les différents niveaux du système local de santé.

Investigation

Pour cela Médecins Sans Vacances a mené des investigations sur le mode de transmission dont notamment une recherche opérationnelle.
Un sommaire scientifique (abstract) intitulé : « Comprendre les modes de contact social et la transmission des plaies ulcéreuses : une étude cas-témoins au Burundi » est disponible permettant de cerner rapidement le sujet et ses points principaux

Cliquez ici pour lire l’abstract.

Formation et appui matériel

D’autre part, à différents niveaux du système, dans les deux districts, nous avons réalisé le renforcement des capacités médico-techniques des prestataires (agents de santé communautaires, centres de santé et hôpitaux de district), dans le système de référence et contre référence, appui en équipements, médicaments et consommables :

→ 14 prestataires en provenance des districts sanitaires de Fota et de Kiganda ont été formés comme formateurs (formation des formateurs). Ils ont à leur tour animer les séances de formation à l‘endroit des prestataires de soins au niveau des formations sanitaires et des agents de santé communautaire.
→ 75 prestataires de soins (centre de santé) des districts sanitaires de Kiganda et Fota ont été formés sur l’identification et la prise en charge des cas.
→ 13 Personnes (dont 10 techniciens pour la promotion de la santé des districts Kiganda et Fota et 2 coordinateurs pour la promotion de la santé de Muramvya et Mwaro) ont été formées sur la sensibilisation et la prise en charge au niveau communautaires des plaies ulcéreuses d’origine inconnue. Elles sont techniquement responsables des agents de santé communautaire au niveau du district.
→ 449 agents de santé communautaire ont été formées dans les districts de Kiganda et de Fota pour le dépistage précoce des cas, référencement et une prise en charge communautaire des cas de plaies simples.
→ Les formations sanitaires du district de Fota et de Kiganda ont reçu les approvisionnements en intrants et équipements.
→ 175 leaders ont été sensibilisés au niveau des 6 communes des deux districts de Fota et de Kiganda.
→ Formation de 4 médecins et équipements des hôpitaux avec du matériel pour le greffage cutané et la cure d’ostéomyélites.
→ 3 séances de supervisions conjointes (équipe cadre de district et superviseur MSV) au niveau des formations sanitaires des districts de Kiganda et Fota.
→ 4 séances de supervisions conjointes (équipe cadre de district et superviseur MSV) au niveau communautaire dans les districts de Kiganda et Fota.
→ Deux réunions de restitution des résultats de la supervision et d’analyse des données dans chacun des districts.
→ Intégration des plaie ulcéreuses sur le canevas de supervision dans les deux districts

Comme dans chaque projet, MSV a pris en compte les aspects de la durabilité écologique (traitement de déchet biomédicaux) et de genre répondant ainsi aux objectifs de développement durable établis par les Nations-Unies.

L’impact du projet pilote

La formation et la sensibilisation sont des facteurs clés de succès dans ce type de projet.

En septembre 2022, les interventions de MSV ont permis à 3809 personnes d’être prises en charge ; dont 1261 dans le district de Fota et 2548 dans le district de Kiganda.

Les patients concernés par la pathologie reçoivent désormais des soins de qualité, de proximité (suite à l’intégration dans tous les centre de santé du district). Ils sont sensibilisés sur l’origine, le mode de transmission de la maladie et ne sont plus obliger de faire plusieurs kilomètres pour bénéficier des soins.

D’un projet pilote à une seconde phase

L’aboutissement du projet pilote étant probant, MSV a poursuivi sa contribution en 2023 avec l’appui de l’OMS. En effet, les résultats de l’investigation pour comprendre les modes de contact social et la transmission des plaies ulcéreuses ont été convaincant pour nous permettre de continuer ce projet. C’est sur cette base que nous avons continué avec des actions de sensibilisation auprès de la population pour la prévention primaire de la maladie, qui est l’élément fondamental pour réduire la transmission.

Pour assurer l’efficience, MSV a travaillé en étroite collaboration avec les médecins chefs de province, de districts sanitaires et directeurs des hôpitaux afin d’améliorer l’offre de soins. Les prestataires des districts et des hôpitaux sont donc les bénéficiaires directs de ce projet. Ainsi la population générale de ces districts, en particulier les personnes souffrant de plaies ulcéreuses constitueront les bénéficiaires indirects de soins de qualité.

Cette deuxième phase aavait élargi son périmètre d’intervention en couvrant dans son entièreté les deux provinces de Mwaro et de Muramvya. La logique d’intervention est basée sur une approche globale de renforcement de capacités médico-technique ainsi qu’une approche communautaire. C’est pourquoi 3 objectifs ont été fixés :

    1. Renforcer les compétences médico-techniques des prestataires dans la prise en charge de la pathologie selon le protocole validé et le système de référence contre référence.
    2. Appuyer les districts sanitaires dans la formation des agents de santé communautaire et la sensibilisation de la communauté sur la prévention primaire.
    3. Appuyer les formations sanitaires en matériels et équipements nécessaires pour la prise en charge des plaies ulcéreuses.

Du Burundi à Utrecht

Novembre 2023, la ville d’Utrecht a accueilli le  congrès ECTMIH (European Congress on Tropical Medicine and International Health). Ce congrès vise à accélérer les liens entre la médecine tropicale, la santé mondiale et la santé planétaire. C’est dans ce cadre que notre projet a retenu l’attention des organisateurs. En effet, nous sommes aux prémices d’une maladie qui n’est pas encore scientifiquement nommée et pourtant MSV contribue déjà à la soigner. Notre expérience sur le terrain, notre investigation, notre appui en formation et en matériel sont déjà un cas d’école.

 

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